Julien Astresses : l’instinct des lettres

Moisséen de 13 ans, Julien, récemment sacré champion départemental de Seine-et-Marne, a disputé cet été ses premiers championnats du monde de Scrabble duplicate au Québec. Ce jeune joueur brillant et appliqué ayant grandi dans cette culture du mot juste, fait rimer exigence et plaisir du jeu.

Une histoire de famille

Chez les Astresses, le Scrabble est une affaire de famille. Le père, Pascal, a été titré vice-champion du monde à Dakar (Sénégal) en 2008 et guide aujourd’hui les joueurs du comité sud-est francilien. La mère, Catherine, a fondé en 2022 le club de Scrabble de Lieusaint “Les Petits Scrabbouillards”, devenu le plus grand club d’enfants de France. Passionnés tous deux, c’est lors d’un tournoi qu’ils se sont rencontrés. C’est donc naturellement que leur fils, Julien, est entré dans l’univers du Scrabble duplicate* dès le plus jeune âge. À quatre ans à peine, “aussi haut que la table, avec son biberon”, il circulait déjà entre les rangées les jours de compétition. “Je suis tombé dedans quand j’étais petit”, dit-il avec le sourire. Sa mère acquiesce : “Il observait tout. Il savait déjà quand lever le bulletin.” Ces gestes simples sont restés : regarder le tableau, écouter les lettres, écrire net. “Ce qui compte, au duplicate, c’est de réfléchir vite et bien”, résume Julien.

À la maison toutefois, on ne “joue” pas ensemble. Chacun son écran, chacun son rythme. “On s’encourage, mais on se laisse travailler”, sourit sa mère. Scolarisé en quatrième au collège La Boétie, Julien cadence ses semaines entre l’école et l’entraînement. Le lundi, il s’assoit parmi les adultes au club de Lieusaint ; le mardi, il arbitre les enfants, les guide. “Il aime transmettre sans brusquer”, glisse Catherine. En plus, il s’entraîne “une heure par jour, parfois plus”, travaille les petits mots qui construisent des cathédrales, affine la vitesse du blitz sans perdre la netteté du duplicate. Et résume sa méthode : “La mémoire est un muscle”, et il la travaille chaque jour, un peu, beaucoup, passionnément.

L’art des anagrammes

Dans un petit carnet bleu, s’alignent des tirages comme des énigmes, car l’art des anagrammes n’a pas de secret pour lui. Son totem y figure à l’encre fine : chocolats + i. La solution n’apparaît qu’à ceux qui acceptent de regarder autrement : catholicos. “J’aime bien donner ce tirage aux champions… Parfois, ils ne trouvent pas”, confie-t-il, mi-malicieux, mi-fier.

Chercher, retourner les lettres, voir le mot surgir dans son esprit — ce déclic nourrit sa patience autant que sa vitesse. Cet été, au Québec, Julien a enchaîné les tournois : un trophée en “partie originale” (où un joker s’invite à chaque coup) et une médaille en Open Saint-Maurice (2e chez les juniors). L’ambiance ? “Intense”, trois parties par jour pendant huit jours. Dans la voiture, en route vers un tournoi, la liturgie se répète : “Regarder, écouter, écrire clairement”, dit sa mère. “On joue, on apprend, on recommence”, enchaîne le fils. Leurs voix se répondent, comme deux façons de dire la même exigence : patience et élan. “J’aime quand le mot apparaît d’un coup, poursuit Julien. C’est comme si tout s’alignait.” L’envie ? “Faire mieux la prochaine fois”. À court terme, il vise un billet pour Tunis, prochaine halte des Mondiaux. Case après case, Julien grandit, avec l’instinct des lettres, et le calme des joueurs qui savent où ils vont. Cap donc maintenant sur de nouveaux défis.

Envie d’en savoir davantage sur le Scrabble et ses tournois ? Rendez-vous sur le site de la Fédération Française de Scrabble

*Le Scrabble duplicate est un scrabble sans hasard — à chaque coup, tous les scrabbleurs jouent les mêmes sept lettres et la même grille.

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